Cass. com., 18 mai 2022, no 20-21852, F–B
Il résulte des articles L 622-17, I, du Code de commerce et 38 du CGI que, lorsque la clôture de l’exercice fiscal, qui seule permet de déterminer le bénéfice net imposable, est postérieure à l’ouverture de la procédure collective, le paiement de l’impôt sur les sociétés constitue pour les entreprises qui y sont assujetties une obligation légale inhérente à l’activité poursuivie après le jugement d’ouverture donnant naissance à une créance éligible aux dispositions du premier texte.
Si la jurisprudence a sensiblement éclairé la question de l’éligibilité des créances postérieures au traitement préférentiel des articles L. 622-17 et L. 641-13 du Code de commerce, certaines créances, par leur nature particulière, continuent de poser difficulté. L’impôt sur les sociétés que doit la société mère à la tête d’un groupe fiscalement intégré est de celles-ci. La concernant, en effet,
l’articulation du droit des entreprises en difficulté avec le droit fiscal se heurte au rapport différent de chacune avec la personnalité morale des sociétés du groupe. Tandis que la procédure collective retient comme principe l’autonomie juridique des sociétés du groupe, le régime de l’intégration fiscale au contraire aboutit à la nier faisant de la société mère, la redevable de l’impôt dû par le groupe dans son ensemble.
Dans l’arrêt sous analyse, une société mère avait été admise au bénéfice de la sauvegarde par jugement en date du 12 juillet 2017. Suite à la clôture de son exercice comptable en date du 31 décembre, l’administration lui notifia le 28 mai 2018 un avis de mise en recouvrement afin d’obtenir paiement de l’impôt sur les sociétés dû par le groupe. En l’occurrence, celui-ci était important compte tenu d’une cession opérée par sa filiale à 100 % en janvier 2017 soit avant que ne s’ouvre la sauvegarde. Saisie de la difficulté, la cour d’appel de Paris refusa de considérer que la créance fiscale était éligible au paiement à l’échéance au motif principalement que la créance n’était pas née en contrepartie d’une prestation fournie à la société débitrice ou pour les besoins de la procédure. De façon somme toute assez logique, la Cour de cassation casse cette décision rappelant que le fait générateur de l’impôt sur les sociétés se situe à la date de clôture de l’exercice comptable et que doivent être considérées comme « utiles » les créances résultant d’une obligation légale inhérente à l’activité poursuivie après le jugement d’ouverture. Que le bénéfice imposable trouve son origine dans un produit antérieur à l’ouverture de la procédure et dans une opération réalisée non pas par la société mère mais par sa filiale doit donc être vu comme indifférent.